BILAN MOBILITE : BIENVENU SUR LA COTE D’USURE

Sur la mobilité des personnels du premier degré, la situation dans les Alpes-Maritimes est tout simplement catastrophique. Au mouvement inter, 45 % des demandes de mutation visent à rejoindre le Var. Pas une seule n’a été satisfaite. C’est un chiffre qui, à lui seul, dit tout : la souffrance, la colère, la lassitude face à l’éloignement et les fractures familiales ou les trajets hors de prix et interminables. Inscrite dans le temps, c’est même devenu LE marqueur du mouvement du premier degré dans notre académie.

D’un côté, l’attractivité du 06 s’effondre et mécaniquement, de l’autre, celle du Var se renforce. Les chiffres le confirment : les durées moyennes de séparation familiale augmentent, les demandes de congé parental dans le 06 bondissent de 10 points en un an, tandis que les recours, eux, diminuent. Non pas parce que tout va mieux, mais parce que le désespoir s’est installé. Quand on ne croit plus à rien, on ne conteste plus rien.

Et pour cause : rien ne semble pouvoir enrayer cette mécanique. Le Rectorat ne laissera pas les titulaires fuir le 06, sous peine de devoir les remplacer par des bataillons de contractuels. Le Rectorat continuera à orienter massivement les stagiaires vers le 06, pour combler artificiellement le déficit d’attractivité. Stagiaires qui devenu titulaires chercheront désespérément à rejoindre leur département d’origine. Et le Rectorat continuera, au nom d’un équilibre de gestion, à déséquilibrer davantage des vies entières, en aggravant les situations personnelles des agents. En poursuivant cette gestion à courte vue des ressources humaines.

On comprend bien la logique comptable et le difficile maintien de l’équilibre académique dans une telle situation. Mais rien ne sera réglé un jour si la boite à outil de nos gestionnaires se limite aux affectations autoritaires. Les collègues ne fuient pas le 06 parce qu’il y ferait plus frais qu’à Toulon ou parce que les cigales y chanteraient moins fort. La raison structurelle de cette volonté d’exode vers le Var c’est le cout du logement. Ainsi, quand la Rectrice propose de demander au ministère un calibrage du mouvement « plus favorable » pour affecter davantage dans le 06, nous ne sommes pas persuadés de la réussite de la manœuvre. Faire du 06, la terre d’accueil méridionale de celles et ceux qui cherche un climat moins humide et les UV semble vain.

Pour s’attaquer réellement au problème, il faut utiliser les bons leviers. En fait, c’est à peu près vrai pour tout ce qu’on entreprend, ce n’est qu’avec les bons outils qu’on fait un bon travail. Or, cette situation est d’abord le résultat d’un choix politique, celui d’avoir abandonné depuis 1948 l’outil de correction des inégalités territoriales pour les agents publics : l’indemnité de résidence.

Créée après la Seconde Guerre mondiale pour compenser les écarts de coût de la vie, cette indemnité devait permettre aux fonctionnaires d’habiter dans les zones où le logement était plus cher, souvent dans des villes détruites ou saturées par la reconstruction.

Trois zones avaient été définies : +3 %, +1 % ou 0 % sur le traitement brut.

Depuis, rien n’a changé. Les cartes sont restées quasiment figées, comme si le marché immobilier et les réalités économiques n’avaient pas bougé d’un centime. Dans les Alpes-Maritimes, à peine quelques zones sont classées à 1 %, et encore ! Le reste du département, malgré des loyers parfois comparables à ceux de la région parisienne, reste classé à 0 %. Voilà ce qu’on appelle une gestion à courte vue, une gestion qui oublie l’essentiel.

Soyons charitable, le Rectorat n’est pas comptable de cela. Pour autant, la CGT le lui a rappelé. Si ce problème doit trouver un début de solution, Madame la Rectrice devrait avant tout s’adresser au ministère de la Fonction publique. Comme premier témoin de la situation, elle doit contribuer à faire rouvrir le dossier de l’indemnité de résidence et revoir en profondeur la carte des zones, pour rétablir une équité minimale entre territoires. Car au fond, ce qu’on observe dans le 06 n’est pas qu’un déséquilibre administratif. C’est une fracture sociale : entre ceux qui peuvent encore vivre là où ils travaillent, et ceux qui doivent s’exiler pour respirer.

Nous sommes bien conscients que l’indemnité de résidence ne réglera pas tout. Mais c’est un outil immédiat, juste et cohérent pour commencer à corriger le désastre actuel.

La CGT le dit et le répète depuis plusieurs années : toute l’académie de Nice devrait être – au minimum – classée à 3 %.