Déclaration CGT au Conseil Supérieur de l'Education

Déclaration CGT Éduc’action au CSE 11 Mai 2020


Voici deux mois que la population de notre Pays vit confinée. Pour autant nous tenons à souligner le caractère extrêmement mature et responsable de la population dans son immense majorité. Sans sa discipline et son abnégation silencieuse, le bilan de cette épidémie pourrait être bien plus terrible.

Après une entrée chaotique en confinement, nous sommes aujourd’hui au jour « J » du déconfinement dans des conditions toujours chaotiques.
En effet sur décision du président de la République, les petits écoliers doivent retrouver le chemin de l’Ecole, avant les collégiens et les lycéens dont le retour est soumis à conditions. Ce choix, à l’encontre du Conseil scientifique qui prônait une réouverture en septembre, est avant tout une décision politique destinée à remettre en route la machine économique créatrice de profits.
Pour rassurer, le gouvernement parle de progressivité, de volontariat, de garanties sanitaires sans lesquelles la réouverture ne se ferait pas …Mais sur le terrain, où d’ailleurs un grand nombre d’entre nous seraient bien plus utiles aujourd’hui, et dans les faits, cette réouverture à marche forcée et dans la précipitation pose nombre de problèmes et de questions, et génère stress et inquiétudes.
Annoncé le 13 avril pour le 11 mai, la CGT Éduc’action considère ce retour à l’école prématuré, très insuffisamment préparé pour ne pas dire hasardeux et dangereux ! Et il n’aura pas fallu attendre trop longtemps pour en faire la démonstration : dès samedi, la presse annonce que la rentrée au collège de Chauvigny était repoussée en raison de la détection de 4 cas de convid-19 au sein des personnels qui la préparaient. Nous sommes pourtant dans la Vienne, département classé en zone verte. Quelle sera la situation dans une semaine après la reprise, partout sur le territoire y compris dans des territoires où le virus circule encore activement ?
Si l’école ouvre et que l’instruction est obligatoire, pourquoi laisser le choix aux familles entre deux systèmes, le distanciel ou le présentiel, choix d’ailleurs largement remis en cause pour les parents personnels de l’Education nationale ?
On retrouve là ce qui caractérise la politique de ce gouvernement depuis son arrivée au pouvoir :
Un poids et deux mesures. D’un côté ceux qui pourront se permettre d’être en télétravail et pourront garder leur enfant à la maison, de l’autre les classes laborieuses qui n’auront pas d’autre choix que de déposer leurs enfants à l’école pour retourner travailler. Les mesures concernant les autorisations spéciales d'absence pour garder les enfants avec 100% du salaire ne vont-elles pas être remplacées, pour les salariés du privé, par du chômage partiel rémunéré à 84% du salaire et que dire pour les personnels agents publics pour lesquels elles ne sont même plus possibles !!!
Si l’enseignement en distanciel reste d’actualité, c’est bien que la sécurité sanitaire ne peut pas être respectée. La ministre du travail insiste bien dans le cadre d’un déconfinement progressif, sur le maintien du télétravail partout où c’est possible pour quelques semaines encore. Alors pourquoi exiger des AESH ou des AED d’être présents dans leur établissement alors même qu’ils ne pourront pas y exercer leurs missions et qu’à leur domicile en télétravail, ils seraient dans de bien meilleures conditions de sécurité.
Alors que les rassemblements de plus de 10 personnes sont interdits en extérieur, le ministère nous demande d’accueillir 15 élèves dans des espaces fermés avec des règles de distanciation souvent irréalisables au vu de la configuration des locaux.
Alors oui, le ministère a produit, certes tardivement, protocole sanitaire et circulaire pédagogique censés parer toute résurgence d’une seconde vague et aucune école ne rouvrira sans mise en oeuvre des recommandations qu’ils contiennent. Mais les protocoles sanitaires, comme la circulaire pédagogique permettent tout sauf l’apport de la sécurité et la sérénité dont les élèves ont besoin pour apprendre et les personnels pour exercer leurs missions. A-t-on oublié toute notion d’humanité ? De fait, c’est bien une garderie à vitrine pédagogique qui va se mettre en place à partir de la semaine du 11 mai.
Seuls les tests sur l’ensemble de la population scolaire et des personnels seraient en mesure d’écarter véritablement tout danger de contamination. Nous avons bien compris que ce n’était pas possible, puisque questionné sur la possibilité de tester, notre ministre a répondu « il n’y a pas pénurie de tests, mais il ne faut pas les gâcher » ! Alors devons-nous accepter de mettre en péril la santé voire la vie des personnels et des élèves ? Non ! C’est pour cette raison que nous appelons les personnels à user de leur droit de retrait quand ils le jugeront nécessaire.
De nombreux élus locaux ne s’y trompent pas et dans bien des endroits les écoles resteront fermées pour prendre le temps de préparer de la manière la plus satisfaisante avec le plus de garanties possibles ce retour.
Cette séquence inédite, et les bouleversements qu’elle engendre, nous conduisent à faire le constat de l’échec de notre système scolaire pour toute une catégorie de son public. S’il y aura un avant et un après Covid 19, avec un changement de cap, la construction d’un service public fort est une absolue nécessité.
Au-delà des effets d’annonces en effet, la priorité au service public dont celui de l’Education, devra ainsi être affirmée haut et fort. Il est inacceptable que perdurent plus longtemps les inégalités que la crise a révélées et renforcées. Tout comme il sera inacceptable de voir perdurer, le régime d’exception de l’état d’urgence sanitaire qui permet une extension des pouvoirs accordés à l’exécutif et lui donne la main pour mettre en place des loi liberticides et destructrices des droits des salariés et des citoyens de ce pays. La CGT sera mobilisée afin de prévenir toute utilisation abusive de ces mesures partout où cela serait nécessaire.